J'étais en route vers la Grande Tour, rare lieu animé de la ville. Aujourd'hui, la pluie était encore au rendez-vous, et son intensité n'était que plus forte, comparé aux jours précédents. Ainsi, sous l'averse, j'avançai, vêtu d'un chapeau de vannerie et d'une grande cape, comme à mon habitude en cas de fortes précipitations. Mon père souhaitait que j'aille m'occuper d'aider un peu le village pour la préparation à la guerre. Dès le petit matin, il m'avait réveillé, laissé déjeuner et une fois habillé et lavé, m'ordonna de rejoindre la Tour où vivait à son sommet notre Maître divin, Pain-sama. Mon paternel me somma de me dépêcher, car en fonction de ma prestation lors des préparatifs de guerre, les dirigeants du village m'attribuerait un poste plus au moins contraignant sur le front. Les préparatifs étaient en effet une étape importante, voire primordiale si l'on souhaitait s'assurer la victoire. Et je me devais donc, en tant que guerrier de l'ombre de ce village, de contribuer à la réussite de la patrie. Avançant donc le long des grands immeubles illuminés par des néons aux nombreuses couleurs, je me forçai à ignorer mon entourage pour rejoindre au plus vite la Tour.
Sur place, un Jônin m'attendait. Il semblait connaître mon père, car sa silhouette ne m'était pas inconnue. En rentrant dans la salle d'attributions de missions, un Genin passa à côté de moi. Le Jônin en question venait de lui remettre une mission de rang C, et lui avait fait apparemment la morale. L'air traumatisé et blasé de l'aspirant ninja témoignait de la sévérité dont faisait preuve mon interlocuteur, qui me présenta un petit parchemin avant de prendre la parole d'un ton strict:
— Le village te confie la tâche d'aller présenter une commande au forgeron Kakuzo, puis de transporter la marchandise qu'il te confiera jusqu'au secteur D, c'est-à-dire le Marais de la Pluie où nous avons établi en retrait un camp de base. Aucune bavure, tu as juste intérêt à faire vite pour accomplir ta mission. Ai-je été assez clair ?
— Aucun soucis. Je saurai être rapide et efficace.
Je reçus le rouleau contenant les détails de la commande, la localisation de la forge du dénommé Kakuzo, ainsi que les modalités de la mission. Au dos figurait les coordonnées du campement. Sans tarder, je quittai la Grande Tour, sans me retourner pour saluer le Jônin que j'avais laissé en plan. La mission était plus simple, puisque la forge était sur la route menant au Marais de la Pluie. Il ne me restait donc plus qu'à m'arrêter chez Kakuzo pour récupérer les armes et équipements pour ensuite les déposer comme convenu au cœur du marais. Afin de gagner du temps, j'avais fait usage du Shunshin no jutsu, pour me téléporter au plus près de la forge. Le bâtiment que je trouvai quelques minutes plus tard était un modeste établissement, situé au pied d'une de grandes tours d'Amegakure no satô. L'enseigne décrivait clairement l'intérieur et son contenu: Forge de Kakuzo. Son propriétaire était un forgeron sans renommée qui travaillait pour le compte d'Ame. En temps de paix, il réparait les armes et équipait les ninjas venant se fournir en shurikens, senbons ou kunaïs. En temps de guerre, la donne était différente et la paye aussi. Il fournissait directement notre nation en armes, et renflouait sa fortune. Lorsque je rentrai dans la forge, je pus constater une file d'attente bien plus longue qu'avant, où Ame était une nation prospère. Alors qu'avant des ninjas venaient refaire leurs stocks d'armes pour les prochaines missions à venir, je remarquai des civils. Leur air froid et leur regard aguerri par les conflits intérieurs me firent comprendre qu'ils souhaitaient également s'armer pour éventuellement repousser un envahisseur, comme Suna ou Iwa.
Je passai à côté de la file d'attente et demandai à la caissière, une jeune femme sans beauté apparente, l'endroit où son maître forgeron se trouvait. Elle désigna une salle située derrière moi mais je n'eus pas le temps de me retourner pour y aller que je croisai justement le fameux Kakuzo. L'homme, un molosse jouant entre la quarantaine et la cinquantaine, m'accueillit simplement dans son lieu de travail, sans politesse. Je me présentai alors à lui, comme étant le ninja envoyé par les instances d'Ame pour réquisitionner des milliers de shurikens et kunaïs, de dix bons katanas et d'une centaine de notes explosives. Le forgeron aux yeux verts et aux cheveux bruns acquiesça et me demanda de le suivre. Dans la réserve de sa boutique, il me demande de l'aider à rassembler la commande. Souhaitant boucler au plus vite cette mission avant le repas, je pris dans des caisses en bois les projectiles, puis les sabres, avant d'avoir sur les bras une grosse caisse, puis au-dessus une autre caisse plus petite et enfin un gros rouleau contenant les étiquettes explosives. Je remerciai par la suite d'un air cynique et enfantin Kakuzo en quittant la forge, puis me dirigeai vers le Grand Marais. Je déposai d'abord contre le mur de la forge les caisses, enfilai rapidemment ma cape et réajustai mon chapeau de vannerie, puis reprenant les armes en main, je repartis sous l'averse toujours aussi présente.
Sous la lumière artificielle d'Amegakure no satô, j'avançai au plus vite, malgré le poids conséquent des boîtes abritant des outils de guerre. Par moment, je devais ralentir afin d'éviter de tamponner quelques passants trop peu attentifs. Je ne voulais pas les heurter non pas par bonté, mais du fait que le précieux contenu des coffrets ne tombe. Attentif à la fois sur la cargaison ainsi que sur les passants, je finis enfin par quitter le village pour me retrouver dans le Marais de la Pluie. Bien évidemment, on me fournit de quoi respirer un air filtré et non pas toxique voire mortel. Revêtant donc un masque, je concentrai mon chakra dans mes pieds pour marcher sur l'eau omniprésente dans les lieux. Le chemin ne serait plus très long, puisqu'il me suffisait de traverser cette zone désertée par les Hommes pour arriver ensuite au campement, donner la cargaison puis revenir au village faire mon rapport.
— Voilà donc la fameuse base d'Ame... sa taille n'a rien à voir par rapport à la puissance de notre armée de la Pluie.
J'étais en effet face au campement où je devais déposer les paquets. A la veille de la guerre, les armées étaient plus préoccupés à s'entraîner, se préparer mentalement et à finir les derniers préparatifs. Par conséquent, les forces en présence étaient réduites dans l'endroit. Quelques tentes de taille variable, protégés par un abri en pierre, étaient disposés ici et là dans le plateau situé au-dessus du Marais. Lors de mon arrivée, un confrère Chûnin m'interpella. Je lui évoquai alors les raisons de ma venue dans cet endroit et une fois qu'il comprit mes paroles, il me dirigea dans une grande tente. Une fois à l'intérieur, je pus constater la présence de hauts gradés, qui attendait ma venue. Ils me demandèrent de déposer les armes sur le côté, et j'exécutai sans broncher. Une fois fait, ils me remercièrent pour mon geste, en ajoutant que je fus assez rapide. Je ne répondis pas à cette flatterie et saluai aussitôt les ninjas présents pour repartir de plus belle.
Une bonne demi-heure plus tard, j'étais au domaine de mon clan, situé à côté de la centrale d'Ame. J'étais rentré au village, avais déposé mon rapport de mission, et profiter un peu de mon temps libre pour m'acheter quelques senbons en attendant le repas. Chez moi, ma mère m'attendait. D'un regard froid et désintéressée, elle me proposa sèchement à manger. Je m'installai en face d'elle, sur une table basse et mangeai à ses côtés un bol de riz. Ma matinée s'était achevée sur la réussite d'une simple mission de rang D, néanmoins, elle s'était achevée de la même façon qu'elle avait commencé, c'est-à-dire dans la monotonie de la pluie belliqueuse d'Ame...